Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
la girouette
6 octobre 2006

La bête qui meurt

la_bete_qui_meurt

Quand on vit chaste, sans sexe, comment supporter les défaites, les compromis, les frustrations de l'existence? En gagnant plus d'argent, toujours plus? En faisant des enfants? Ça aide, mais c'est loin de valoir la Chose. Parce que la Chose a élu domicile dans ton être physique, dans la chair qui naît, la chair qui meurt. Parce que c'est seulement quand tu baises que tu prends ta revanche, ne serait-ce qu'un instant, sur tout ce que tu détestes et qui te tient en échec dans la vie. C'est là que tu es le plus purement vivant, le plus purement toi-même. Ce n'est pas le sexe qui corrompt l'homme, c'est tout le reste. Le sexe ne se borne pas à une friction, à un plaisir épidermique. C'est aussi une revanche sur la mort. Ne l'oublie pas, la mort. Ne l'oublie jamais. Non, le sexe n'a pas un pouvoir illimité, je connais très bien ses limites. Mais dis-moi, tu en connais, un pouvoir plus grand?

(...)

Les soirs où elle  n'est pas avec moi, je me torture à me demander où elle est et ce qu'elle peut bien fabriquer. Mais même quand elle vient passer la soirée, une fois qu'elle est retournée chez elle, impossible de fermer l'oeil. Être avec elle est une expérience trop forte; je me redresse dans mon lit, et je crie, au coeur de la nuit: "Consuela Catsillo, fous-moi la paix!" Ça suffit, je me dis. Lève-toi, change les draps, reprends une douche, débarrasse-toi de son parfum, et puis débarasse-toi d'elle! Il le faut. Tu lui livres une bataille perdue d'avance. Où sont donc la plénitude, le sentiment de possession que tu devrais connaître? Puisque tu l'as, comment se fait-il que tu ne l'aies pas, cette fille? Tu ne l'as pas alors même qu'on te la donne. (...) Ça m'inquiète qu'elle se promène avec ce chemisier. Sous la veste, le chemisier. Et sous le chemisier, la perfection. Un jeune homme va la trouver, et il va l'emporter. Il va me la voler à moi, qui ai mis le feu à ses sens, qui lui ai donné sa stature, moi le catalyseur de son émancipation, moi qui l'ai préparée pour lui.

Publicité
Publicité
Commentaires
L
-> Kirikou: ce que j'aime, c'est que quand tu postes ici, c'est pas pour ne rien dire! Moi aussi j'ai beaucoup aimé la partie "civilisationnelle" sur la révolution sexuelle dans les campings.<br /> Faut voir ce que Bibitch en a pensé maintenant.
K
J'ai trouvé ce livre assez anodin, même pas énervant. Il (me) manque peut-être justement ce point de vue de Consuella, ce point de vue de fille, que P. Roth n'explore pas (si vous me passez l'expression), et qui m'aurait plus intéressé que ce vieux -toujours- con de "prof" (éminent! attention!) : je suis un mec qui a besoin qu'on lui explique les femmes, je n'arrive pas à en avoir une dans la tête. Lui n'a pas une femme dans la tête, juste les seins et la jeunesse d'une femme. Et sa propre jeunesse à laquelle il s'accroche sans me toucher (les jeunes femmes qui se cherchent un vieil apologète/pygmalion dépendant ne m'excitent pas -pas encore-, alors il m'a fait pitié sans me rendre jaloux, donc sans m'identifier du tout, dieu merci ou hélas).<br /> <br /> Quand on ajoute à ça une vision d'une relation en tant que "bataille", je pousse un soupir de lassitude devant les baby-boomers mal guéris, mal grandis. A ceux dont le dépucelage s'est fait sans capotes.<br /> <br /> J'ai bien aimé ses passages sur la révolution sexuelle des campus : il y avait à l'époque un élan, un choix de la transgression qu'il arrive à transmettre. Mis en miroir avec la décrépitude contemporaine du héros (et avec les épisodes précédents de la vie de David Kepesh, qu'il ne m'a pas donné envie de lire), au moins on ne peut nier une certaine sincérité. Mais la sincérité ça peut aussi être un vieillard qui s'épanche, et pour lequel, par respect des anciens, on fait preuve de patience.<br /> <br /> Et puis il faut arrêter avec le cancer en tant que ressort dramatique, comme avec les aveugles, les autistes, et les accidents d'avion : à croire que les écrivains pensent toujours à écrire un futur film à Oscar larmoyant.<br /> <br /> Moi je conseille un bon Le Clézio, qui parle de la mer comme personne (du Bachelard appliqué?), et de l'enfance, qui a une autre vision du temps, du monde plus grand qu'une chambre (ou qu'une salle de bains claustrophile où l'on croit "posséder" -mais où sont passés les hippies?- en léchant des serviettes hygiéniques. "Wouaaaah", dira-t-on chez Ardisson).<br /> <br /> Pfff.
L
-> bibitch: et pourtant, ce n'est pas l'extrait que j'ai à la majorité des gens à qui j'ai parlé de ce livre... rendez-vous aux pages 51 à 54.
B
L'extrait choisi aura eu son effet. A cause de toi, je vais retourner à la FNAC.
la girouette
Publicité
Derniers commentaires
Archives
Publicité